LA MAISON MÈRE un projet au long cours entrepris à l’hiver 2016. À ce moment-là en effet, j’ai commencé de photographier une propriété familiale dans l’Ain, construite et occupée par des maçons de père en fils depuis les années 1950 et où cohabitent deux maisons.
Ce qui m’a intéressée au départ, c’étaient les matériaux entreposés, comme souvent à la campagne, autour des deux maisons : des carcasses de voiture, des outils, des matériaux de construction, ..
Lors d’un après-midi de mars froid et morne, où l’atmosphère de l’hiver finissant était plutôt lugubre, avec sa lumière blanchâtre et brumeuse, ses arbres dénudés, j’ai remarqué le grand tas de bois et vu les carcasses de voiture devant la grange ; la porte de la remise était ouverte, il se dégageait vraiment quelque chose de sombre et d’inhabituel, et cela m’a saisie. Je n’avais pas d’appareil photo sur moi, juste mon vieil iphone s4 mais j’ai senti qu’il fallait que je retienne cette impression, immédiatement. À mon tour je voulais saisir cet endroit que je n’avais jamais perçu de cette manière là et dont je ne m’étais jamais sentie aussi proche. Cela a donné lieu à un première petite série d’images que j’ai intitulées BLACK AND BLUE, en référence à la couleur et à l’aspect cabossé.
À partir de là, et revenant sur les lieux avec le Canon, je me suis mise à tourner autour des deux maisons sans montrer à l’image la maison des parents, construite par le père dans les années 1950, siège de l’entreprise à l’époque, et qui dans sa forme a très peu évolué, ni la maison construite par l’un des fils, qui elle fait régulièrement l’objet de remodelages et de transformations. Je me suis concentrée sur ces îlots provisoires, ces volumes, ces agencements, témoins d’une réorganisation permanente, organique, qui se crée sur le terrain et naît au gré des projets, des humeurs et de la personnalité du fils, qui est aussi l’un des principaux propriétaires du lieu.
Cela a abouti à une deuxième série d’images intitulées CASTLES MADE OF SAND. Ces ‘‘îlôts’’, ‘’constructions’’, ‘’équilibres’’, ‘‘nids‘‘, ... sont faits de matériaux. Des assemblages éphémères comme résultats de gestes, autant organisés qu’intuitifs, et dans lesquels j’appréciais une certaine qualité esthétique et expressive : j’ai trouvé beaux les objets déposés là, l’apparente improvisation avec laquelle cet occupant recompose l’espace et redéfinit continuellement son territoire autour des maisons.
Ces formes ont une dimension entropique, à la fois solide et organique, résistante et fragile.
Dans cet environnement où le lieu est présent mais sa configuration toujours aussi peu lisible, le point nodal m’est apparu dans la maison d’origine, alors encore habitée par la mère. C’est “la maison-mère”, que j’ai photographiée de nuit. Les trois images qui en ont résulté ne montrent pas non plus le bâtiment mais la nuit qui enveloppe la maison, les lumières qu’elle produit ou encore un réverbère public qui éclaire simplement la nuit autour. L’invité (ou l’alter ego), où l’on aperçoit un invité sur la terrasse de la maison-mère, a été prise depuis la terrasse de l’autre maison.
La mère, enfin, apparaît dans la série SIMONE, qui lui est consacrée.
Avec ce tableau qui s’esquisse au fil du temps, brossé à partir de l’ambiance du lieu, de ses marques, de ses ombres, de l’absence, un portrait, peut-être, se dessine..
La série réunit aujourd’hui ces quatre groupes d’images : BLACK AND BLUE (2016), CASTLES MADE OF SAND (2018-2022), le titre éponyme LA MAISON MÈRE (2018-2023) et SIMONE (2022).
LA MAISON-MÈRE is an on-going project started in 2016. Right now, the series is set in three parts : BLACK AND BLUE (2016), CASTLES MADE OF SAND (2018-2022) et LA MAISON MÈRE (2018-2023).
It described the atmosphere of a property in south Burgundy (Ain). This place was built and has been occupied by a family of builders since the 1950ies.
A series is dedicated to the mother herself: see SIMONE (2022).